<p align="center"><strong><u>FÊTE DU BAPTÊME – année C – Dimanche 13 janvier 2013 – Evangile selon Luc 3, <sub>15-22</sub></u></strong></p>
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<p align="center"><strong><u>LE BAPTÊME, PASSAGE DANS LA NOUVELLE CRÉATION</u></strong></p>
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<p>Lorsque – sans doute en l’an 28 de notre ère – un certain Johanan se met à prêcher et à proposer un baptême dans les eaux du Jourdain afin d’obtenir le pardon des péchés, cette initiative inédite étonne et scandalise puisque, selon la Loi, le pardon de Dieu ne peut être obtenu que par des sacrifices d’animaux et certains rites précis célébrés au temple. Jean, fils de prêtre, effectue donc une rupture, un passage du « prêtre » au « prophète » en reprenant le geste que le prophète Elisée avait requis du général syrien Naaman pour obtenir la guérison de sa lèpre (2<sup>ème</sup> Livre des Rois, chap. 5). En se plaçant à la frontière du pays et sur la rive orientale du fleuve, Jean propose à son peuple un nouvel « exode » car son baptême n’est pas une simple ablution statique, une bénédiction mais un « passage » dangereux: les candidats juifs doivent <u>sortir</u> du pays pour rejoindre Jean, retraverser le fleuve frontière et <u>rentrer</u> en Israël. Ils vont retrouver leur milieu, leur famille, leurs occupations mais vont-ils « se convertir » ? Auront-ils le courage d’adopter la manière de vivre telle que Jean leur a enseignée ? Le rite ne leur donne aucune force.</p>
<p>Jean les observe et il prend conscience de l’inefficacité de son baptême, de l’insuffisance de sa mission : c’est pourquoi il tourne son auditoire vers l’arrivée d’un « autre » qui réalisera ce qu’il échoue à faire :</p>
<p style="margin-left:36.0pt;"><strong><em>Le peuple venu auprès de Jean Baptiste était en attente et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Messie. Jean s’adressa alors à tous : « Moi, je vous baptise avec de l’eau mais il vient, <u>celui qui est plus puissant que moi</u>. Je ne suis pas digne de défaire la courroie de ses sandales. <u>Lui vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu ».</u></em></strong></p>
<p>Nous avions déjà entendu ce texte lors du 3<sup>ème</sup> dimanche de l’Avent : sautant 4 versets de Luc, l’évangile de ce dimanche poursuit par l’événement capital qui ouvre Jésus à sa mission.</p>
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<p><strong><u>LE BAPTEME DE JESUS</u></strong></p>
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<p style="margin-left:36.0pt;"><strong><em>Comme tout le peuple était baptisé et que Jésus priait, après avoir été baptisé lui aussi, alors le ciel s’ouvrit. L’Esprit-Saint descendit sur Jésus, sous une apparence corporelle, comme une colombe. Du ciel, une voix se fit entendre : « C’est toi mon fils : moi aujourd’hui, je t’ai engendré ».</em></strong></p>
<p>Luc présente le baptême de Jésus comme l’aboutissement de la démarche populaire mais, pour lui, il ajoute une note capitale : « <strong><u>IL PRIAIT »</u></strong>. Au contraire de la plupart des gens qui ont effectué le rite sans s’interroger davantage, Jésus, lui, prend ce bain avec sérieux : un rite n’est pas magique, il ne cause pas son effet de façon automatique car il doit être assumé par son bénéficiaire. Ayant traversé l’eau, Jésus ne se juge pas quitte : en silence il se met à la disposition de son Dieu. « Me voici, Seigneur, pour faire ta volonté. Si Jean est un vrai prophète, que signifie ce rite ? À quoi m’entraîne-t-il ?... ».</p>
<p>Alors se produit un événement capital que personne ne remarque, dont Jésus seul fait l’expérience.</p>
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<p><strong><u>LE CIEL S’OUVRE</u></strong>. Nous sommes enfermés dans un monde matériel que nous percevons par nos sens mais la réalité est infiniment plus vaste : nous baignons dans une sphère invisible dont l’infini du ciel est comme une image, que les grands artistes pressentent et que le cœur humain, en son fond, désire. Depuis quelques siècles, « le ciel » semblait fermé : Dieu était silencieux, il ne parlait plus par ses prophètes et voilà que, au sein de la supplication intense de la prière de Jésus, la communion avec Dieu est rétablie. La relation ciel/terre, Dieu/humanité est Jésus.</p>
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<p><strong><u>L’ESPRIT DESCEND … COMME UNE COLOMBE.</u></strong> Les commentaires expliquent qu’il s’agit d’une image, d’une comparaison avec 3 références bibliques qui en expliquent le sens :</p>
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<li>Célèbre début du livre de la Genèse : « <strong>Au commencement Dieu créa le ciel et la terre…Le Souffle (l’Esprit) de Dieu <u>planait</u> à la surface des eaux »</strong> (Gen 1,<sub> 2</sub>) : le verbe est utilisé pour les oiseaux qui couvent leurs petits. Donc Jésus est envahi par l’Esprit créateur et ce moment marque le départ d’une nouvelle genèse, d’une « re-création ». Jésus est l’Homme Nouveau. Le baptême n’est pas une bénédiction, un rite protecteur : il fait effectivement « renaître » par l’Esprit.</li>
<li>Lorsque les eaux du déluge baissèrent, Noé lâcha une colombe : à la 2<sup>ème</sup> fois, elle revint à lui <strong>« et voilà qu’elle avait au bec un frais rameau d’olivier »</strong> (Gen 8, <sub>11</sub>). Désormais l’eau nettoie, purifie du péché et Jésus offre la paix à ceux et celles qu’il accueille dans « l’arche » de l’Eglise.</li>
<li>Dans la tradition juive, le Cantique des cantiques est interprété comme une allégorie de l’amour entre YHWH et Israël, sa bien aimée,<strong> « sa colombe » </strong>(2, <sub>14</sub> ; 5,<sub> 2</sub> ; 6,<sub> 9</sub>). Ainsi Jésus prend sur lui tout son peuple, il l’assume pour le reconduire dans l’amour de son Dieu. Le baptême personnel est responsabilité pour le peuple, prise en charge de la communauté.</li>
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<p>Voilà pourquoi Jésus est « plus puissant » : parce qu’il a reçu l’Esprit, la Force, l’Amour Infini de son Père, il peut ouvrir le Royaume, donner naissance à une humanité nouvelle. Jean ne pouvait qu’exhorter, faire la morale : Jésus, lui, spiritualise, divinise.</p>
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<p><strong><u>UNE VOIX DU CIEL : « C’EST TOI MON FILS : MOI AUJOURD’HUI JE T’AI ENGENDRÉ ». </u></strong></p>
<p>Cette phrase est une citation du psaume 2 qui raconte la cérémonie d’investiture du nouveau roi. Dieu sacre Jésus et celui-ci déclare : <strong>« Je publierai le décret : le Seigneur Dieu m’a dit : « Tu es mon fils ; moi aujourd’hui je t’ai engendré. Demande-moi et je te donne les nations en patrimoine… »</strong> (Ps 2,<sub> 7</sub>).</p>
<p>Jésus était Fils de Dieu dès sa naissance mais à partir de son baptême, Dieu le fait ROI, guide du Royaume que Dieu veut instaurer et qui doit s’étendre au monde entier. Ce projet se heurtera à l’opposition, à la haine de beaucoup de puissances : les grands se ligueront pour le faire échouer mais, contrairement au psaume, Jésus ne <strong>« les écrasera pas avec un sceptre de fer »</strong> (Ps 2, <sub>9</sub>) : il sera « doux et humble de cœur », n’usant pas de violence mais proposant le partage de l’amour infini de Dieu afin que tous les êtres humains puissent découvrir, eux aussi, que Dieu est leur « Père » et qu’ils sont FILS et FILLES de ce Père.</p>
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<p><strong><u>BAPTEME DU CHRETIEN</u></strong></p>
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<p>Dès l’origine, la foi chrétienne n’est pas un sentiment privé : elle doit être une entrée dans une communauté concrète par le rite du Baptême. Au jour de la Pentecôte, lors de sa première prédication, Pierre proclame : <strong>« Convertissez-vous, que chacun reçoive le baptême au nom de Jésus Christ pour le pardon de ses péchés et vous recevrez le don du Saint-Esprit »</strong> (Ac 2, <sub>38</sub>).</p>
<p>Lorsque Saül, le persécuteur, rencontre le Christ vivant, il rejoint tout de suite la communauté de Damas : Ananie lui impose les mains pour recevoir l’Esprit et il le baptise (Ac 9<sub>, 17-18</sub>).</p>
<p>Dans sa dernière lettre, Paul écrit : <strong>« Baptisés en Jésus-Christ, c’est dans sa mort que nous avons été baptisés. Par la plongée dans sa mort, nous avons été ensevelis avec lui afin que, comme le Christ est ressuscité, nous menions nous aussi une vie nouvelle »</strong> (Rom 6,<sub> 3</sub>)</p>
<p>Il faudrait relire les homélies des Pères de l’Eglise qui racontent la pratique des premiers siècles. Les convertis, présentés par les <u>parrains que l’Eglise leur donnait,</u> suivaient une longue <u>formation</u> pour apprendre les trésors de l’Evangile et la vie qu’ils auraient à mener en conséquence. Puis, la nuit de <u>Pâques</u>, ils étaient baptisés devant toute la communauté : ils se déshabillaient, descendaient dans une petite piscine, <u>proclamaient leur credo en étant baptisés</u>, remontaient de l’autre côté, étaient revêtus d’une aube blanche et, en chantant « Le Seigneur est mon berger… », la procession se dirigeait vers la chapelle pour <u>communier à l’Eucharistie</u>. La scène du Jourdain se reproduisait.</p>
<p>C’était un moment solennel, une nuit inoubliable : les « nouveau-nés » étaient conscients de la gravité de l’engagement qu’ils prenaient, ils savaient l’hostilité qu’ils allaient sans doute affronter. Mais l’Eglise était une communauté qui les accueillait comme ses enfants, elle leur promettait une vie fraternelle, une assistance permanente, une formation continue, le partage régulier du Pain de Vie.</p>
<p>La coutume du baptême des nouveau-nés est en voie de disparition mais le nombre de baptêmes d’adultes est en nette croissance. Allons-nous retrouver le sérieux, le courage de nos premiers frères ?....La crise de l’Eglise marque peut-être son renouveau, sa « re-naissance ». Le sérieux du baptême en est la clef.</p>
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<p align="right">Raphaël D., <strong>dominicain</strong></p>
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